Dans les colonnes du Figaro du 23 mars 2020, Dominique Reynie s’exprime une nouvelle fois sur le devenir de l’Europe et force est de constater que les sombres perspectives qu’il décrit semblent malheureusement correspondre à un obscurantisme croissant de l’intellectuel de renom.
On regrettera le ton de ses analyses, renforcées par l’autocritique d’un européen convaincu qui savait nous faire aimer l’Europe comme une vocation, une passion, une perspective, une réponse. Depuis quelques mois en effet, s’inspirant de l’école de Karl Schmitt, Dominique Reynie s’acharne à dénoncer « ennemi de l’Europe » des Etats « voyous » comme la Russie et la Chine par exemple, – qui cela dit entre eux ont bien peu à voir – ou des populismes qui se nourrissent de choix politiques nationaux ou européens inopportuns ou de vils sentiments isolationnistes dans un monde qui ne peut plus l’être.
La Chine en soi ne peut assumer la responsabilité du désastre ; elle devrait au contraire nous servir d’exemple sur les mesures à prendre tout comme l’Italie n’est pas responsable du foyer de la maladie en Europe mais encore une fois ce pays européen, dont la leadership est arrivée au hasard d’alliances politiques imprévisibles, a su prendre des décisions qui auraient du nous inspirer elles aussi sans attendre. Nous avions dans notre constitution un article en mesure de faire écho (Art.16) au message 5 fois prononcé par le Président Macron « nous sommes en guerre », rien n’en fut !
L’Europe qui souffre, Professeur, c’est la votre. Celle qui a cherché chez son voisin une responsabilité dans la diffusion de la maladie, celle qui dénonce des choix de confinements successivement adoptés comme une idée originale alors qu’elle ressort du copie collé. Mais notre pays la France – rappelons nous de Tchernobyl et prenons à témoins tous ceux qui en France ont du se priver de la tyroïde – aime se sentir exceptionnelle au lieu d’avoir la modestie de capitaliser les expériences de tiers. L’Europe dont rêvait le Professeur Reynie était celle de la construction d’un réflexe européen, de l’entraide et de la collaboration, de la complicité et de la décision face aux enjeux migratoires, culturels, économiques et géopolitiques.
Mais aujourd’hui le choix proposé par Dominique Reynie est à une hypothétique confrontation avec la Russie européenne. En mutant son raisonnement de l’Europe à l’Occident Dominique Reynie se trahit et opère une sacrée marche arrière alors que des avions russes chargés de matériels et d’aides se posent en Italie, que des médecins chinois interviennent en Lombardie depuis 15 jours, ceux la même qui collaborent avec le Professeur Raoult depuis bien avant la crise.
Le monde et surtout notre Europe ne ressortira pas grandie d’un manichéisme du siècle dernier mais au contraire se renforcera d’une indépendance solidaire et critique tant sur son flan est qu’ouest.
C’est en cela que l’Europe pourrait nous offrir de nouvelles perspectives auxquelles adhérées en ne cédant pas aux réflexes du passé mais au contraire en enjambant l’histoire.
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